Efficience intellectuelle : la WPPSI
- Choix du test
Le choix de la WPPSI s’impose d’office par une demande universitaire (passation d’un test d’efficience intellectuelle) et du fait de l’âge de l’enfant.
- Préparation de la passation
La lecture du manuel s’impose en termes de préparation. Le matériel nécessaire (chronomètre, crayon, feuille…) doit être préparé soigneusement à l’avance. Le manuel donne des conseils sur le positionnement de l’examinateur face à l’enfant, sur la gestion du matériel. Je me suis entraînée à placer les cubes correctement et dire les consignes, mais j’ai bien conscience que seule la pratique permettra d’apprécier mes compétences et difficultés.
- Condition de la passation
On sera loin des conditions idéales requises : une salle calme et bien éclairée…Nous allons devoir faire avec ce milieu plus ou moins bruyant et rempli de distractions. L’enfant en question semble avoir été attirée vers ce qui se passait sur les autres tables puisqu’elle fit la réflexion que les cubes des autres tables n’étaient pas les mêmes que les nôtres…Mais cela semble naturel au vu de la proximité des tables, de l’âge de l’enfant et de la durée de la passation. À part quelques mouvements corporels (pieds qui tapent et mains qui bougent, se lever et s’asseoir), cet enfant me paraît avoir été présent et concentré.
J’ai installé le matériel sur la table, en cachant le chronomètre de la vue de l’enfant.
- Analyse de la passation (critiques)
Première passation :
J’appréhendais un peu le fait de gérer simultanément le matériel, la passation des consignes, le chronomètre et l’observation des comportements de l’enfant pendant la passation de chaque subtest. De plus, le fait de noter les réponses de l’enfant en temps réel complexifie encore tout ceci. J’ai eu quelques difficultés avec le subtest cubes car adopter le point de vue de l’enfant m’est difficile. De plus, je ne pense pas avoir pris assez le temps de vérifier que l’enfant, pour les cubes bicolores, prenait en compte seulement le dessus des cubes et non les côtés.
Lors de la première séance, l’enfant a réalisé cinq subtests, ce qui est relativement conséquent. Prenant en compte l’aptitude de L. à répondre rapidement selon moi, je me suis demandé si je n’avais pas malgré moi imposé une dynamique trop rapide à cet entretien, du fait peut-être de mon stress et de mon désir que cette petite fille réussisse. J’ai pris conscience que c’est à moi d’impulser le rythme de la passation, en respectant le rythme naturel de l’enfant.
Deuxième passation le 16/11/12:
J’ai tenté de tenir compte de mes précédentes réflexions sur la manière de rythmer cette passation. Nous avons pris le temps pour passer les 3 items restants (temps de rangements, de réflexion…). Je me suis sentie plus à l’aise et maîtrisant mieux le chronomètre. L. a davantage parlé d’elle, de sa vie quotidienne. Elle m’a dit qu’elle était contente de revenir et souhaitait refaire les cubes….
- Analyse cognitive et clinique des résultats du test
Passation 1 : le 26 octobre 2012
A° Analyse subtest par subtest :
- Subtest cubes :
Juste avant de débuter ce subtest, elle m’affirma qu’ « elle savait tout faire, vraiment tout. » A la fin, l’enfant a émis l’avis que ce subtest était le plus difficile pour elle.
Des erreurs de positionnement et de figure à l’envers sont visibles aux items 8 et 9. Il me semble que L. ne prend pas assez de temps à regarder le modèle. Les items de la série B semblent demander plus d’efforts pour L, qui bouge beaucoup ses pieds. Pour les items de la partie B, elle attrape les cubes et tente sans réellement se référer au modèle. Sa stratégie est de poser les cubes sur le modèle, mais quand elle pense avoir terminé, elle ne décale pas l’ensemble des cubes pour vérifier si cela correspond au modèle. Elle agit très rapidement. A l’item 13, elle refuse implicitement de faire la figure demandée et « dessine » ce qu’elle nomme un cerf-volant. Je lui rappelai la consigne de faire comme le modèle. Elle recommença et réussit. A l’item 14 elle dit que « c’est dur ». Je la rassurai en lui disant que c’était normal, que ces items sont plus difficiles que les premiers. Mais je me rendis compte sur le moment qu’elle avait peut-être échoué à l’item 14 parce qu’elle considérait le côté des cubes et non le dessus. Dans le doute, je lui rappelai que ce qu’elle devait voir se situait au-dessus des cubes. Ce rappel permet peut-être d’expliquer la réussite à l’item 15.
Ce subtest nécessite la mise en œuvre de diverses stratégies de résolution : ici le sujet ne semble pas avoir privilégié la stratégie synthétique, mais j’ai quelques hésitations en ce qui concerne la stratégie analytique ou globale. Elle fait peu d’aller et retour entre sa production et le modèle, ce qui me fait pencher davantage vers la stratégie globale. La question, au vu de sa vitesse d’exécution, est de savoir si elle est sensible à la pression du temps ou plus précisément, quel est son rapport à la tâche. A un niveau plus clinique, je n’ai remarqué que peu d’aller et retour entre le modèle et sa réalisation. En ce qui concerne le schéma de construction, le plus souvent, L. débute de bas en haut. Elle utilise préférentiellement sa main droite pour saisir les cubes. Sa latéralité usuelle est de la main droite. Elle se tient bien droite.
Mon manque de précision dans la consigne, mes difficultés à faire passer ce subtest et à le coter, la rapidité de L. à agir et répondre à la tâche (visible aussi dans la tâche matrice et identification de concepts) m’incitent à faire passer un subtest supplémentaire dans ce domaine qui remplacerait ce subtest cube. Je voudrais savoir son rapport au raisonnement et à la réflexion. Y a-t-il quelque chose qui l’empêche de prendre son temps avant d’agir ou est-ce le signe d’une maîtrise efficiente des processus du traitement de l’information?
Selon ses résultats (Score brut 22 et note standard 7), les capacités d’analyse visuospatiale et le raisonnement sur les relations spatiales semblent se situer à la limite de la zone moyen. Ce résultat sera à mettre en lien avec ceux de l’identification de concept, de matrices et d’assemblage d’objets. En aparté, je lui ai demandé si elle fait des puzzles et si elle aime cela. Elle m’indique qu’elle adore faire des puzzles, surtout de 30 pièces.
- Subtest information :
Le score brut de L. (25) amène une note standard supérieure à celle obtenue par les enfants de 4 ans et 9 mois. Aucune difficulté de compréhension ne semble visible. Elle répond très rapidement et de manière efficace. L’étendue de ses connaissances à propos du monde semble se situer au-dessus de la moyenne des enfants de son âge. Les réponses sont en général sous la forme d’une phrase courte, pertinente le plus souvent. Il n’y a pas d’échec dans un type particulier de réponse. La mémoire à long terme semble efficiente ainsi que la compréhension et l’expression verbale.
- Subtest matrices :
- semble prendre du plaisir à faire ce subtest (elle dit : « j’aime ça ! ».) Elle répond très rapidement, aussi bien aux items faciles qu’aux items plus difficiles. Il n’y a donc pas de changement dans l’attitude de l’enfant en fonction de la difficulté des items. C’est ce qui peut peut-être être source d’erreurs potentielles, car les items plus difficiles nécessitent plus de réflexion. Cette vitesse de traitement l’empêche-t-elle de prendre le temps de décomposer les figures de la série ? Sa note standard se situe dans la zone moyen. Ce résultat va dans le même sens que celui obtenu au subtest cube. Le raisonnement non verbal semble correct et la mémoire de travail est efficiente.
- Subtest vocabulaire :
Un peu plus difficile de se concentrer, car le temps de passation est déjà long pour une enfant de cet âge (elle se lève et bouge les mains sur la table). Elle répond très rapidement. Pas de réponse pour l’item 11 : qu’est-ce qu’un chien ? Cette enfant répond par des phrases structurées.
Selon le tableau A 12, L. a une performance d’une enfant de 5 ans et 10 mois. La compréhension des consignes est très bonne et rapide. L’étendue des connaissances du lexique et la formation de concepts verbaux semblent donc être supérieures à celles des enfants de son âge. La mémoire à long terme est efficiente ainsi que le niveau de niveau de développement du langage. Cet enfant semble tirer parti du milieu dans lequel elle évolue. Au niveau de chaque item, il n’y a pas de variations visibles dans le niveau lexical et dans le niveau de définition. L. donne presque à chaque fois au moins deux réponses. Cette performance corrèle celle réalisée au subtest Information.
- Subtest identification de concepts :
La première erreur me semble être causée par la précipitation avec laquelle répond L. malgré cette erreur, elle affirme que « c’est très facile ». A l’item 3 je lui demande pourquoi elle a mis l’objet 2 et 4 ensembles : elle répond que c’était « parce que c’était des choses… ». Cette réponse me fit craindre une difficulté de compréhension de ce subtest. Je reprécisai alors que tous les objets étaient des choses, mais que certains allaient ensemble, car ils parlaient de la même chose, ils se ressemblaient. Elle acquiesça, mais je ne sais pas si mon explication fut claire. J’ai des gros doutes sur les stratégies employées à partir de l’item 15. Répond-elle au hasard ? Beaucoup de précipitation est visible à la fin, est-elle fatiguée ? Lassée ? Il me semble que j’aurais dû lui demander de justifier ses réponses à chaque fois, pour infirmer mon hypothèse de réponse au hasard… Je ne sais donc pas comment coter…Dois-je refaire passer un subtest supplémentaire dans le domaine des performances, car j’ai des doutes aussi en ce qui concerne les cubes ?
Je m’interroge aussi sur le fait que L. réponde toujours très rapidement, sans se donner le temps de la réflexion, surtout quand cela devient plus difficile pour elle. Est-ce parce qu’elle comprend très vite ou est-ce possible que cela soit une stratégie pour éviter de penser ?
Sa performance (note standard 11) est celle réalisée par les enfants de son âge généralement. L’aspect non manipulatoire permet peut-être à L. d’être plus à l’aise que dans le subtest cube. En conclusion, son aptitude au raisonnement catégoriel, son raisonnement abstrait et inductif, ses capacités d’abstraction semblent se situer pour ce subtest dans ceux des performances des enfants de son âge.
Après réflexion, je décide de conserver ce subtest en ne tenant pas compte de la dimension de hasard dans les réponses de L. Par contre je laisse de côté le subtest cube du fait d’une mauvaise présentation de la consigne et d’une observation défectueuse des stratégies de L.
Ressentis : Au vu de la rapidité de la passation, il est possible que je n’aie pas laissé assez de temps à L. pour répondre et que j’aie donné à cet examen une dynamique trop rapide. Peut-être ai-je involontairement émis une pression à répondre. Je vais essayer de ralentir le rythme ou de mieux m’accorder avec le sien. A moins tout simplement que L. ait une vitesse de traitement très efficace ou alors que ces deux hypothèses soient correctes…Dans tous les cas, L. me semble être très à l’aise au niveau verbal.
Au niveau de nos interactions, L. me semble être une petite fille à l’aise, souriante. Elle me parla d’épisodes de sa vie et de sa maman. L. paraît réceptive à mes propos, en tient compte.
Je m’interroge sur son fonctionnement psychique : quelles sont ses capacités à se remobiliser après un échec, quelle est sa confiance en elle, comment affronte-t-elle les difficultés ?
Deuxième passation le 16/11/12
- Subtest symboles :
J’ai arrêté L. à 120 secondes. Elle a très vite compris la consigne et se lance avec un plaisir très visible dans la tâche. Elle travaille rapidement. Quelques oublis sont visibles (3) malgré la répétition de la consigne. Mais aucune erreur n’apparaît. L. a donc un score de réussite supérieur à la moyenne des enfants de son âge (si on regarde le tableau A.12, un enfant de 4ans et 10 mois a en général un score de 13-14 à ce subtest). Sa rapidité d’exécution, aperçue dans d’autres subtests, est donc visible et confirmée. Celle-ci amène malgré tout à quelques oublis. Les capacités de traitement perceptif visuel, de discrimination visuelle sont efficientes. Le résultat de ce subtest va devoir être mis en corrélation avec celui du subtest code pour pouvoir être interprété de la manière la plus fine possible.
- Subtest raisonnement verbal
Sa performance est dans la moyenne de celle des enfants de son âge pour ce subtest. Sa manipulation des concepts verbaux est efficace ainsi que sa méthode de résolution, plutôt impulsive au début puis « réfléchie ». En effet, L. attend le deuxième ou troisième indice pour donner une réponse. Ce résultat va dans le même sens que ceux obtenus aux subtests vocabulaire et information. Ces trois résultats dans le domaine des performances verbales mettent en lumière que L. a une bonne maîtrise et compréhension du domaine verbal. Elle y semble à l’aise.
- Subtest code
- montre une compréhension très rapide de la consigne et souhaite s’engager dans la tâche très rapidement. J’ai dû lui repréciser qu’elle devait attendre que je le lui autorise. Selon le tableau A12, son score est supérieur à ceux des enfants de son âge. Il corrobore celui obtenu au subtest symbole. L’exactitude dans ce subtest est parfaite et se fait par des aller et retour multiples (mais pas systématiques) au modèle. La tenue du crayon est efficace ainsi que la qualité de la copie. La posture de L. est adéquate (assise confortablement, bien droite). L’efficacité de la mémoire visuelle à court terme est donc visible. Cela nous permet de conclure que L. a une vitesse d’exécution rapide et efficace dans la plupart des situations, surtout dans le domaine verbal et écrit.
- Subtest Assemblage d’objets
- semble apprécier de réaliser ce subtest. Elle se montre persévérante et minutieuse, tente que les jonctions soient bien alignées. Elle me dit qu’elle veut faire tous les puzzles, même les « durs », ce qu’elle tenta de faire d’ailleurs. Elle échoua aux deux derniers items. Je repère qu’elle retourne toujours la première pièce par la main gauche, or elle dessine et écrit de la main droite. Peut-être devrai-je vérifier sa latéralité innée. Sa performance et note standard est dans la moyenne de celle obtenue par les enfants de son âge. En ce qui concerne le niveau cognitif, L. montre des capacités à utiliser un feedback sensori-moteur, à planifier et à anticiper les relations entre les parties. Au niveau de l’analyse clinique, sa coordination motrice est efficiente, la vitesse d’exécution est dans un style assez impulsif (méthode essai-erreur) au début puis minutieux à la fin (elle veille à ce que les jonctions soient bien alignées). Il n’y a pas d’obsession visible pour les détails et la tolérance à la frustration semble « ordinaire ».
Conclusions générales :
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- Dans le domaine performance, les résultats sont dans la zone moyen. La note composite nous permet de dire que 55 pour cent de la population du même âge que L. a des performances supérieures. La moyenne des trois subtests performance confirme ces observations. L. a donc des processus efficients dans les domaines de la coordination oculomotrice, dans la planification et dans le raisonnement non verbal.
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- Dans le domaine verbal, L. est très à l’aise et précise. Ses performances la situent dans la zone moyen fort. Seulement 23 pour cent de la population du même âge a des performances supérieures. De plus les résultats sont identiques aux trois subtests. Cette forte homogénéité accentue le fait que le domaine verbal semble le domaine de prédilection de L, comme le confirme la moyenne des trois subtests verbaux. En conclusion, l’étendue du lexique est correcte ainsi que le niveau de pensée catégorielle. La mémoire à long terme est efficiente.
- Dans le domaine de vitesse de traitement, les résultats mettent en lumière que L. travaille et réfléchit très rapidement et en général efficacement. Ses résultats se situent dans la zone moyen fort. Seuls 16 pour cent de la population du même âge que L. a des résultats supérieurs. La mémoire à court terme est efficiente ainsi que le traitement perceptif visuel.
- Analyse des différences
Echelle | Somme notes standard | Note composite | Rang percentile | 95%intervalle de confiance |
Verbale | 36 | 111 | 77 | 102 -118 |
Performance | 29 | 98 | 45 | 90 -107 |
Vitesse de trait. | 25 | 115 | 84 | 103- 122 |
Totale | 77 | 107 | 68 | 93 -114 |
QI Verbal- QI de Perf. | QIV 111 | QIP 98 | +13 | 12.74 | O | 19,2 |
QI Verbal-Vitesse de trait. | QIV111 | QVT 115 | -4 | 13.87 | N | 37,8 |
QI de Perf-Vitesse de trait. | QIP 98 | QVT 115 | -17 | 14,32 | 0 | 12.8 |
Les notes composites révèlent des différences significatives assez visibles entre les quotients verbaux et performances ainsi qu’entre les quotients performance et vitesse de traitement. Cette différence significative semble assez inhabituelle en ce qui concerne le quotient de performance et celui de la vitesse de traitement. (< à 15pour cent).
Un point faible (subtest matrice) est visible quand on prend la moyenne globale.
De nombreux points forts émergent (inf, vocabulaire, raisonnement verbal, code, identification de concepts) sur lesquels L. s’appuie.
Les performances de L. à la WIPPS 3 sont assez hétérogènes (différence de 13 et de 17) quand on compare le domaine verbal et de vitesse de traitement avec celui de performance. Tout ceci nous autorise à poser une hypothèse d’un raisonnement verbal plus efficient que visuel.
J’avais émis une hypothèse d’une vitesse de traitement importante qui pourrait amener des erreurs. Les résultats aux divers subtests confirment une grande vitesse de traitement. J’avais également émis l’hypothèse de différences de performances de L. dans le domaine de performance par rapport au domaine verbal. Ceci est confirmé.
En nous appuyant sur toutes ces observations, sur le QI total (107), sur son rang percentile ainsi que sur l’intervalle de confiance, par rapport aux enfants du même âge, le fonctionnement intellectuel de cet enfant, mesuré à l’aide du test standardisé, se situe actuellement dans la zone moyen. Le QIT total peut être pris en compte du fait de l’homogénéité des résultats du protocole. La probabilité est importante (95pour cent) que son QIT se situe entre 93 et 114. Son QIT est placé au 68ème rang percentile, ce qui signifie qu’elle est plus performante que 68 pour cent des enfants de son âge qui constituent le groupe de référence.